Démarrons cette bibliographie avec Slam de Nick Hornby (10/18, 7,90€). slam.jpgL'hilarant auteur british (About a boy, Haute fidélité, Vous descendez ?...) se confronte à un exercice périlleux : se glisser dans la peau d'un ado de 15 ans, dans l'action et le verbe. Exercice donc aussi pour le traducteur (Francis Kerline) : tous deux s'en tirent bien, pour autant que je puisse en juger, votre interlocutrice n'ayant plus 17 ans (mais n'étant pas, du moins l'espère-t-elle, une « vieille bique » !) Passons : si vocabulaire et péripéties semblent bien adaptés à l'âge ingrat, l'histoire pour sa part, croustille à souhait, prenant même des petits chemins fantastiques. Sam mène sa vie de jeune boutonneux tranquillement, lycée, potes, skate (il peut même communiquer avec T H, Tony Hawk, ancien dieu de skate, par l'entremise d'un poster et de son autobiographie, qu'il connaît par coeur), et approche, plus ou moins réussie, de la gent féminine. Elevé par une mère qui l'a eu à 17 ans, il n'est en effet pas sans savoir ce qu'il encoure s'il se laisse un peu trop aller de ce côté-là. Mais écoute-t-on vraiment ce que nous disent nos parents ? Sorte de roman d'apprentissage,  la prise de tête en moins, l'humour, le recul, la lucide caricature n'empêchent pas d'aborder des questions très sérieuses, notamment celle de la grossesse adolescente, surtout lorsque l'on connaît le nombre record de jeunes mamans de moins de 20 ans outre-manche...


Papa, Shalom Auslander va aussi le devenir, et sous peu. Problème, alors que depuis 10 ans, il vit auslander.jpgtranquillement à la campagne avec sa compagne, loin de son envahissante et un peu trop pratiquante famille, il se retrouve confronté à une affreuse question : quel sort doit-il réserver au prépuce de son enfant ? Parce que Shalom est juif, et élevé comme tel, entre principes très strictes de l'orthodoxie juive, sévères écoles rabbiniques, et séjour en Israël... Pourtant, il ne peut s'empêcher de faire des choses pas très orthodoxes (je sais, un peu facile), l'adolescence le laisse pantois, partagé entre transgression des principes (il adore les hamburger et autres sucreries pas du tout cachères !) et peur de la punition divine : langue pendue au pilori s'il blasphème, famille décimée s'il ne brûle pas les magazines pornos de la maison, défaite des Rangers s'il allume la télé pendant Shabbat. Cela donne La lamentation du prépuce (10/18, 7,90€). C'est vrai que le titre fait un peu peur, mais une fois passée l'appréhension (que vont penser mes voisins de métro/plage ?), on découvre de croustillants pactes avec Dieu, des questionnements théologiques, des situations quelques peu absurdes, un récit autobiographique brillant, hilarant, et irrévérencieux. Aujourd'hui, Shalom Auslender vit à New York avec sa femme et son fils (qui sont donc toujours en vie, n'en déplaise au tout puissant !), et récidive avec Attention dieu méchant (sortie le 17 septembre, Belfond), 14 nouvelles iconoclastes.


Juif, Samuel l'est aussi. Mais surtout, il passe son bac, à pavé.JPGla veille de mai 68, et est le héros d'une bande dessinée Le pavé originel (sortie le 9 septembre, Delcourt, 14,95€) qui trouve ses racines dans le roman éponyme d'Adam Pianko (La Martinière), inspiré de la vie de l'auteur, né dans un camp de travail russe durant la Seconde Guerre mondiale, émigré à Téhéran puis en Ouganda, il travaille ensuite à Paris, dans le prêt-à-porter, avant de se lancer dans l'écriture. Une rencontre avec l'illustrateur Nicolas Wintz leur donne l'idée d'une adaptation dessinée. Résultat : un récit rythmé, tout en marron et blanc (on regrette juste l'écriture « informatique »), l'histoire d'un jeune lycéen d'origine juive, hanté par d'encombrants ancêtres, qui le perturbe lorsqu'il passe son bac, veulent absolument le marier à une juive, surveillent ses faits et gestes... Le jeune homme se veut révolutionnaire et se retrouve à la tête des collections de son père, industriel textile, errements idéologiques et sentimentaux jusqu'à ce fameux jour de 68 où fut lancé le premier pavé, traversée du XXème siècle en suivant l'histoire de cette famille à la mode ashkénaze. Pas facile de devenir un homme !